« Nous pouvons construire un avenir où la dignité, la liberté et la justice sont garanties »

« Nous pouvons construire un avenir où la dignité, la liberté et la justice sont garanties »

 

Discours de la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, Marija Pejcinovic Buric, lors de la rencontre organisée par la Maison de l’Europe de Paris à la Mairie de Paris, le 15 décembre 2023

 

« Mesdames et Messieurs,

 

C’est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd’hui dans ce lieu emblématique et somptueux, l’Hôtel de Ville de Paris, lieu certes marqué par de nombreux événements de l’histoire de France, mais aussi et surtout par les reconstructions. Ici, l’histoire de la ville de Paris se mêle à la quête universelle des droits humains. Je remercie la Maison de l’Europe de Paris et son Président, Monsieur Michel Derdevet, de me donner l’opportunité d’aborder des thèmes cruciaux qui touchent au cœur de notre mission au Conseil de l’Europe.

 

Le Conseil de l’Europe incarne une alliance unique des nations européennes, unissant ses 46 États membres dans un objectif commun pour promouvoir la démocratie, les droits humains et l’État de droit. Fondé sur le principe que la paix durable repose sur la justice et la coopération, le Conseil de l’Europe œuvre inlassablement pour édifier un continent où chaque individu peut jouir de sa dignité et de ses droits fondamentaux, transcendant les frontières et célébrant la diversité culturelle qui constitue notre riche patrimoine européen.

 

C’est pour cela que le Conseil de l’Europe a adopté en 1950 la Convention européenne des droits de l’homme. Avec notre Cour européenne des droits de l’homme, ce texte constitue un véritable bastion qui a rendu possible – et continue de rendre possible – l’exercice de nos droits et libertés fondamentaux partout sur notre continent.

 

En ces temps où le recul démocratique menace et où les tentations sécuritaires sont fortes, nous devons rester fermes dans notre engagement en faveur de ces principes et ne jamais les considérer comme acquis. C’est non seulement notre devoir, mais c’est aussi la garantie d’un avenir où la justice et la liberté prévalent.

 

Si aujourd’hui la peine de mort n’existe plus parmi nos États membres, si les libertés individuelles sont mieux protégées, et si les droits des personnes sont plus respectés, c’est largement grâce au Conseil de l’Europe. Mais ceci est un travail constant que nous devons faire tous les jours. Il n’est jamais totalement accompli.

 

En ce moment, à seulement 2000 km d’ici, nous vivons un conflit meurtrier en plein cœur de l’Europe. Ce conflit demeure une préoccupation majeure pour le Conseil de l’Europe. Nous devons soutenir l’Ukraine et ses citoyens dans leur lutte contre l’agression russe. Avec cette agression, la Russie n’a pas seulement attaqué l’Ukraine, mais également nos valeurs et nos principes. Nous nous devons de réagir et de rester aux côtés de l’Ukraine autant que cela sera nécessaire.

 

Et pour les victimes de ces conflits, nous devons aller au-delà des paroles. C’est pourquoi, nous avons créé un Registre des dommages, un premier pas concret vers la compensation des victimes pour les dommages physiques et moraux qu’elles subissent tous les jours. Nous travaillons également sans relâche afin d’examiner les moyens de protéger efficacement les droits des millions d’enfants ukrainiens résidant dans les États membres du Conseil de l’Europe, contraints de fuir leur patrie depuis le début de la guerre. Il est crucial de prendre en compte les traumatismes subis par les enfants affectés par la guerre. A cet égard, ma Représentante spéciale sur les migrations et les réfugiés a mis en place une série d’initiatives visant le soutien psychologique de ces enfants et leur permettant une meilleure intégration dans les pays d’accueil.

 

La guerre en Ukraine n’est pas le seul enjeu auquel nous faisons face. Lorsqu’une machine nous demande de vérifier si nous sommes des humains ou lorsque les glaciers s’effondrent devant nos yeux, nous ne pouvons pas nier que l’intelligence artificielle et les enjeux environnementaux restent des défis majeurs de notre temps. Le Conseil de l’Europe est en première ligne pour les aborder car ces problématiques transcendent les frontières nationales. Aucun État, seul, aussi puissant soit-il, ne peut y faire face.

 

C’est pour cela que nous développons de nouveaux traités internationaux dans ces domaines. Le premier sur l’intelligence artificielle vise à assurer que cette dernière soit utilisée pour le bien de l’humanité, sans violation des droits humains. Le deuxième a pour objectif de protéger l’environnement contre les activités criminelles qui le dégradent, représentant un business générant un chiffre d’affaires de plusieurs centaines de milliards d’euros.

 

Un autre défi de nos sociétés reste l’inégalité entre les femmes et les hommes. Cette inégalité nous empêche de progresser et est la cause principale de la violence basée sur le genre. Notre Convention d’Istanbul sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique est un traité unique. Lorsqu’il est adopté et mis en œuvre par nos États, il sauve des vies. Il s’agit d’un texte de référence pour le monde entier.

 

Le Conseil de l’Europe est également en première ligne de la lutte contre l’antisémitisme, et contre toutes formes de haine, y compris la haine antimusulmane. La montée des actes de haine antisémite ou antimusulmane en Europe est un réel danger. Depuis les terribles événements du 7 octobre, l’embrasement du conflit au Moyen-Orient s’exporte en Europe et dans le monde et il contribue à nourrir ces phénomènes de haine. Nous devons réagir et ne pas accepter l’inacceptable.

 

Enfin, à quelques mois de l’ouverture des Jeux Olympiques de 2024 qui se tiendront à Paris, laissez-moi vous rappeler que depuis plus d’un demi-siècle, le Conseil de l’Europe a développé des instruments pour promouvoir l’intégrité dans le sport et instaurer un environnement sportif sain, éthique et ouvert à toutes et à tous.

 

Par exemple, des normes ont été mises en place pour prévenir la triche et garantir des compétitions équitables, et des mesures ont été prises pour assurer plus de sécurité dans les stades et faire en sorte que les matches de foot et les autres manifestations sportives se déroulent dans un environnement accueillant et sécurisé.

J’aimerais terminer mon intervention en rendant hommage à l’ancienne Présidente de la Maison de l’Europe, Madame Catherine Lalumière qui malheureusement n’a pas pu être parmi nous aujourd’hui.

Catherine Lalumière est un exemple de droiture et de détermination.

Grande figure de la construction européenne, Catherine Lalumière a notamment été la première femme Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe de 1989 – année de la chute du Mur de Berlin – à 1994. Je suis fière de lui succéder à ce poste, plus de 30 ans plus tard, dans un contexte où la lutte pour la démocratie, les droits humains et l’État de droit est plus pertinente que jamais.

Mesdames et Messieurs, en restant unis et déterminés,

nous pouvons faire progresser nos valeurs communes et construire un avenir où la dignité, la liberté et la justice sont garanties pour toutes et tous.

Je vous remercie. »

 

Maison de l'Europe de Paris

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