Compétitions sportives et respect des droits fondamentaux en Europe

Compétitions sportives et respect des droits fondamentaux en Europe

Dans sa résolution du 27 janvier 2022, le Conseil de l’Europe appelait le monde du football à respecter davantage les droits fondamentaux sociaux et environnementaux, notamment en privilégiant l’équité dans le financement du football et dans le marché des transferts, la promotion de l’égalité de genre ainsi que la protection des joueurs et de l’environnement par les pays hôtes de grands événements.

Cette volonté du Conseil de l’Europe de protéger les droits fondamentaux ne se réduit pas au seul secteur du football mais s’étend au monde sportif en général. En effet, le sport a besoin d’être réglementé, notamment en ce qui concerne la protection des droits fondamentaux des sportifs. Cependant, en raison de la tradition d’indépendance de ce secteur, l’intervention des instances judiciaires reste très limitée.

> Conseil de l’Europe et sport : les compétitions sportives comme levier de sociétés démocratiques et respectueuses des droits de l’Homme

Depuis presque 50 ans, le Conseil de l’Europe lutte contre la corruption dans le milieu sportif et pour le respect d’un sport fair-play, sain, éthique et accessible à tous.  Ces travaux contribuent à l’essor de sociétés démocratiques inclusives et respectueuses des droits de l’Homme et de l’État de droit, valeurs qui sont au cœur de l’action du Conseil de l’Europe.

Pour mener à bien ces objectifs, il a mis en place l’Accord Partiel Elargi sur le Sport (APES), une plateforme de coopération intergouvernementale entre instances nationales des pays membres. L’APES permet ainsi le dialogue entre les organismes publics, les fédérations sportives et les ONG. Il a pour but principal de lutter contre les dérives en matière de droits fondamentaux dans le milieu sportif.

En 2013, l’APES a soulevé la question de la prévention des conflits entre droit du sport et droit public au niveau national dans le but de :

  1. Permettre un échange de points de vue entre les pays de l’APES sur le traitement des affaires sportives par les systèmes judiciaires nationaux.
  2. Mettre en place des mécanismes de protection des droits de l’Homme dans le milieu sportif en raison d’un nombre croissant de cas pendant la dernière décennie.

Ainsi, il a établi, en coopération avec la Cours européenne des droits de l’Homme (CEDH), deux manuels de bonnes pratiques pour les juridictions nationales :

  • « La protection des droits de l’homme en Europe dans le cadre des procédures disciplinaires et arbitrales des organisations sportives »
  • « Les procédures disciplinaires et arbitrales du mouvement sportif »

Par ailleurs, les citoyens européens ont le droit de saisir la CEDH lorsqu’ils sentent que leurs droits fondamentaux n’ont pas été respectés dans leurs pratiques sportive. Voici quelques exemples de droits fondamentaux qui sont invoqués devant cette juridiction :

  • Le droit à la vie : La catastrophe de Hillsborough est une des plus grandes tragédies qui ait eu lieu dans l’histoire du football. En 1989, une centaine de supporters de Liverpool perdent la vie lors d’un match en raison d’un dysfonctionnement des corps de sécurité. C’est la première fois que la CEDH évoque le droit à la vie dans une affaire sportive. Cette tragédie a conduit l’Europe entière à adopter de nouvelles règles de sécurité dans les événements sportifs.
  • Le droit à un procès équitable : La corruption et l’impartialité est un sujet récurrent dans les litiges en matière de sport. Beaucoup de sportifs dénoncent face à la CEDH des manques d’indépendance de la part des juridictions sportives nationales.
  • Le droit de réunion : il est souvent invoqué par les associations de supporters des équipes sportives face aux décisions des forces de sécurité nationale.
  • La liberté de pensée, de conscience et de religion : concerne, par exemple, les litiges entre sportifs et instances nationales à cause d’un refus de la possibilité de pratiquer une activité sportive en raison du port de signes religieux.

> Le sport face aux autres institutions supranationales

Les débats sur le non-respect des droits fondamentaux au sein du secteur sportif est un thème qui est de plus en plus d’actualité au sein des organismes internationaux. En effet, le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies a souligné le rôle que le sport et les grands événements sportifs peuvent jouer dans la sensibilisation à l’égalité et à la non-discrimination ainsi que dans la promotion de la paix. Cependant, le sport a bien trop souvent des effets négatifs sur les athlètes et les communautés locales, sur les travailleurs des événements et sur les supporters qui encouragent leur équipe.

En effet, on constate l’essor de litiges dans le milieu sportif où :

  • des athlètes sont victimes d’agressions sexuelles commises par leurs entraîneurs ou par d’autres personnes en position de pouvoir
  • des travailleurs employés à la construction d’infrastructures sportives voient leurs droits du travail bafoués
  • des populations sont déplacées de force pour laisser la place aux infrastructures

Pour faire face à cette problématique, certaines grandes instances dirigeantes du sport, comme la FIFA ou le Comité Olympique, ont pris des engagements sans précédent afin de garantir le respect des droits humains. Ainsi, une des dernières décisions dans ce sens, est le bannissement de la Russie de la Coupe du monde de football ainsi que d’autres compétitions sportives internationales pour la punir de l’invasion militaire de l’Ukraine.

Cependant, les structures qui existent aujourd’hui en matière de protection des droits humains dans le sport ne sont pas suffisantes pour garantir le respect de ces droits pour tous les citoyens.

> Et l’Union européenne ?

L’Union européenne s’est aussi saisie de ce sujet et cherche à mettre en place des mécanismes qui garantissent la protection des droits fondamentaux de ces citoyens dans la pratique sportive.

Dernièrement, les ministres de sports des 27 Etats-membres ont tenu à affirmer que le respect des droits humains et des libertés individuelles doit être une condition d’attribution de l’organisation de grands événements sportifs tels que les Jeux Olympiques et Paralympiques, Championnats du monde et d’Europe. Ils ont aussi condamné les grands événements sportifs internationaux qui se tiennent dans des États où des violations aux droits de l’Homme ont été constatés.

Dans une déclaration du 26 octobre 2021, les députés européens prônaient pour une Union européenne qui s’implique davantage dans le paysage sportif européen afin d’encourager un modèle plus équitable qui s’aligne sur les valeurs européennes de solidarité, de durabilité, d’inclusion, de compétition ouverte et d’équité. Ils expriment leur ferme opposition aux « compétitions dissidentes qui sapent ces normes et menacent la stabilité de l’écosystème sportif global ». Ils ont proposé des solutions pour arriver à cet objectif, par exemple :

  • Accroître la transparence sur les marchés de transfert des joueurs grâce à un cadre européen qui inclut les normes du marché du travail et les réglementations financières de l’UE
  • Encourager les fédérations sportives nationales à égaliser le montant des primes pour les athlètes féminins et masculins
  • Utiliser le poids social du sport d’élite pour sensibiliser aux problèmes rencontrés par les personnes LGTBQI+

 

Article rédigé par le Centre Europe Direct de la Maison de l’Europe de Paris et publié en partenariat avec Voix d’Europe le 15/03/2022.

Maison de l'Europe de Paris

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