- Quelques remarques sur le Discours sur l’Etat de l’Union
Loin d’être le bilan d’une présidence à la tête de la Commission européenne comme nous l’attendions tous, le discours sur l’Etat de l’Union de Ursula von der Leyen a été plutôt un manifeste pour une Union complète, tenu dans l’ordre, en anglais, français, allemand et à nouveau en anglais. Un crédo affirmé, d’ailleurs, dès la première phrase du discours.
« Dans un monde d’incertitudes, l’Union européenne doit répondre à l’appel de l’histoire. Pour cela elle doit avoir la confiance des européens ! »
Pour illustrer ses propos, la présidente de la Commission a passé en revue, un par un, la plupart des domaines dans lesquels l’UE souhaite faire sentir davantage sa présence, mettant l’accent sur certaines compétences qui ont été, au fil des quatre ans passés, des symboles de réussite.
Ainsi, le Green Deal (Pacte Vert) a été un des succès de cette présidence. Lors de son allocution, Ursula von der Leyen a rappelé l’importance de ne pas abandonner la transition écologique déjà en cours : que ce soit pour l’industrie européenne, le maintien de la biodiversité, le commerce équitable, la concurrence et dans la vie quotidienne.
Dans ce domaine, la première annonce pour le futur proche et le reste de l’actuelle présidence (jusqu’au 9 juin 2024, date des futures élections européennes) a été l’ouverture d’une enquête antisubventions sur la présence des véhicules électriques en provenance de Chine.
La présidente a ensuite abordé la question de la Politique Agricole Commune (PAC), en rendant hommage aux agriculteurs, qui ont su assurer le circuit des productions vers les consommateurs en dépit des obligations pesantes et des inondations, ou encore des incendies. « Notre sécurité alimentaire dépend d’eux », a-t-elle affirmé. « La transition écologique et l’agriculture vont de pair, j’en suis convaincue, et nous engagerons un dialogue stratégique pour que le futur de ces deux composantes soi assuré ».
L’accent a été aussi mis sur les défis qui se posent pour l’économie européenne : la pénurie de la main d’œuvre, l’inflation et la nécessité de faciliter l’activité de nos industries par l’allègement des taxes. Alors que l’année européenne 2023 baptisée « année des compétences » touche à sa fin, Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne, a été mandaté pour établir un rapport sur l’avenir de la compétitivité européenne, afin d’améliorer cette dernière.
Elle a aussi déclaré qu’avant la fin de l’année nous désignerons un représentant de l’UE pour les PME (petites et moyennes entreprises), placé sous mon autorité directe », sans oublier les partenaires sociaux : « nous organiserons l’année prochaine, sous la présidence belge du Conseil de l’UE, un sommet des partenaires sociaux à Val-Duchesse » (clin d’œil à Jacques Delors, qui avait convoqué 40 ans auparavant une réunion au même endroit).
La défense numérique n’a pas été ignorée, Ursula von der Leyen a pointé l’importance de l’avancée européenne, qui a été concrétisée récemment avec la DSA (le règlement européen sur les services numériques) : « Il faudra faire de même avec l’IA (Intelligence artificielle). Elle peut être utile dans divers domaines mais il ne faut pas sous-estimer les dangers qu’elle peut créer.
Ursula von der Layen a d’ailleurs rapidement abordé le stade actuel des relations avec le continent africain, le thème des aides européennes pour les pays européens et non-européens affectés par des catastrophes climatiques, et l’attitude européenne envers l’agression russe en Ukraine :« je suis heureuse d’annoncer que nous allons prolonger la protection temporaire accordée aux personnes fuyant l’agression russe en Ukraine ».
Ursula von der Leyen a consacré au thème de l’immigration la partie du discours exprimé en français. Certainement pas dû au hasard, ce moment dédié à la France s’est concrétisé sous la forme d’un message à peine voilé pour l’extrême droite : « j’ai toujours eu la ferme conviction que la migration doit être gérée. Je souhaite la mise en place d’un nouvel pacte sur l’émigration et sur l’asile, un meilleur équilibre entre souveraineté et solidarité ! ». Elle a clos ce chapitre avec un puissant message de remerciements pour la Bulgarie et la Roumanie, qui « ont su nous montrer et faire la preuve des bonnes pratiques mises en place en matière d’accueil : ces pays ont fait la preuve du fait qu’ils méritent de faire partie de l’espace Schengen ; laissons-les entrer sans plus de retard ! ».
La dernière partie de son discours a été allouée à l’élargissement de l’UE vers l’Ukraine, la Moldavie et les Balkans Occidentaux. Dans l’hémicycle du Parlement européen ont résonné plusieurs fois les mots « Union complète » et « élargissement nécessaire » :
« L’avenir de la Moldavie se trouve dans notre Union ».
« L’avenir des Balkans Occidentaux se trouve dans notre Union européenne »
« Nous ne pouvons pas se permettre de laisser de côté nos concitoyens, nous devons compléter notre Union. Nous devons définir une vision pour accomplir l’élargissement ».
« Il nous faut songer à se préparer à la future Journée européenne de l’élargissement ! Cela se fait par le mérite et par la détermination des candidats, par le respect de l’Etat de droit ».
« L’Equipe Europe fonctionnera aussi à plus de 30 membres, même en passant par des conventions et modifications des traités, si nécessaire ».
« A chaque élargissement nous avons donné tort à ceux qui disaient qu’on va être moins efficaces. On a été encore plus efficaces, nous l’avons montré lors de la crise sanitaire due à la pandémie, lors du début de la guerre en Ukraine. L’achèvement de notre Union est le meilleur investissement pour le futur ».
Plus qu’un bilan, le dernier discours sur l’Etat de l’Union prononcé par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a été certainement un manifeste : celui pour une Union complète, verte, orientée vers le futur. Moins de chiffres et plusieurs chantiers en cours annoncés, qui l’attendront au tournant de la première moitié de l’année 2024.
Le plus difficile reste à suivre, avec, notamment, des annonces concernant les demandes d’adhésion en décembre 2023, lorsque le sommet de l’UE sous la présidence espagnole devra décider en matière des perspectives à accorder ou pas.
Retrouvez l’intégralité du discours ici.