On craignait le pire et, en définitive, les résultats électoraux ne sont pas défavorables à l’Europe. Ainsi le taux de participation (50,1%) est honorable et meilleur que dans les élections européennes précédentes.
En outre, la grande majorité des candidats élus sont sur des listes ouvertement pro-européennes, même si chaque liste a sa propre conception de ce que doit faire l’Europe et des réformes à accomplir : La République en Marche /Modem 21 élus ; Europe Ecologie – les verts 12 élus ; Républicains-centristes 8 élus ; Parti socialiste/Place Publique 5 élus ; même La France Insoumise (6 élus) très critique, ne propose pas de sortir de l’Union.
Quant aux partis politiques qui s’affichaient anti-européens et anti-euro, ils ont plus ou moins renoncé à l’idée de sortir de la zone euro ou de sortir de l’UE. Le Front national-Rassemblement national adopte, sur ce point, une ligne parfaitement floue, et se contente de regrouper tous les mécontents sur le thème du « Faut que, y-a-qu’à », le tout avec des relents de nationalisme incantatoires et imprécis.
Bref, dans ces résultats, on ne voit pas un rejet franc et massif de la construction européenne. Mais on ne voit pas non plus une adhésion enthousiaste. Il est évident que l’auto-satisfaction et l’immobilisme des europhiles seraient d’une imprudence mortelle. Il faudra des réformes et changer beaucoup de choses.
Evidemment chaque famille politique a ses préférences sur les réformes à accomplir. Les uns insistent sur la justice sociale, les autres sur l’équilibre rigoureux des finances publiques etc… Mais au-delà des différences politiques, il y a un socle commun de valeurs fondamentales qui a été précisé au fur et à mesure des années dans les différents traités de la construction européenne et dans la jurisprudence des deux Cours de Justice européennes.
En principe ces valeurs humanistes et démocratiques sont partagées par tous les membres de l’Union. Malheureusement ce n’est plus le cas. Et, au nom de la « real politik » certains tournent le dos à ces valeurs. On l’a vu pendant la campagne qui a précédé ces élections, dans nombre de pays touchés par le nationalisme et le populisme. Un exemple mais il y en a d’autres, celui de Victor Orban en Hongrie et son concept de « démocratie illibérale » qui aboutit finalement à une conception autoritaire voire quasi totalitaire du pouvoir.
Problème de croyance, problème de culture, problème de civilisation…
Aujourd’hui ce sont sans doute là, les principaux clivages, les plus lourds de conséquences pour l’avenir de l’Europe, ceux pour lesquels il faut combattre en priorité.
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Dans l’immédiat se pose la question du choix des principaux dirigeants de l’Union pour les années qui viennent. Une prière : que nos dirigeants nationaux ne succombent pas à la tentation de choisir des personnalités qui aient, évidemment à côté de grandes qualités professionnelles, celle de ne pas leur faire de l’ombre.
Aujourd’hui, plus que jamais, l’Europe a un besoin vital de s’incarner dans des personnalités fortes et – osons le dire – charismatiques.
Depuis la nuit des temps, les grands projets, les grandes idées, se sont incarnés dans des hommes ou des femmes bien vivants. Ne laissons pas aux partisans des « pouvoirs forts » « voire totalitaires » le monopole d’utiliser cet atout qu’est l’incarnation dans un être humain, même si, voulant bien faire et être modernes, les constructeurs de l’Europe depuis 70 ans ont cherché à bâtir une organisation purement rationnelle, légale, d’apparence abstraite et fort peu portée sur les sentiments.
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Les élections du 26 mai 2019 ont modifié sensiblement les rapports de force entre les groupes au sein du Parlement européen. Il y a un net renouvellement des élus. Espérons qu’ils seront à la hauteur des défis auxquels nous devons faire face.
Catherine Lalumière