La présidence hongroise du Conseil de l’Union européenne a débuté le 1er juillet 2024, suivant la présidence belge. Le slogan choisi, « Make Europe Great Again » – , faisant référence au « Make America Great Again » de Donald Trump – a surpris plus d’un en UE… Cette présidence intervient dans un contexte bien particulier.
Tout d’abord le contexte politique interne est mouvant, alors que le parti de Viktor Orban (Premier ministre de la Hongrie depuis 2010), Fidesz, semblait faire l’unanimité en Hongrie, un nouveau parti est arrivé sur la scène politique hongroise, Tisza, combattant la corruption et promouvant les valeurs de l’UE. Aux dernières élections européennes, ce parti a gagné sept sièges sur les vingt et un que compte la Hongrie, le Fidesz en a gagné onze. Le contexte économique interne est aussi touché par une forte inflation, que la Commission européenne estime à 4,1 %. Les dernières sanctions envers la Hongrie gèlent les financements européens à hauteur de 20 milliards d’€.
Le contexte politique externe de la Hongrie vis-à-vis de l’UE est marqué par une position guerrière. En effet, une logique de confrontation politico idéologique apparaît, au point d’être privé de fonds de cohésion pour des politiques venant à l’encontre des valeurs de l’UE. Ces sanctions ne favorisent pas l’éveil des consciences, elles alimentent au contraire chez les Hongrois la croyance que la Commission intervient dans un but politique, en particulier contre la Hongrie et ses citoyens.
Le gouvernement hongrois colporte une rhétorique bien différente de celle défendue par l’UE dans le contexte de la guerre en Ukraine, la Hongrie et le Vatican serait « le camp de la paix » et le reste des États membres voudraient la guerre avec la Russie, c’est pour cela que la Hongrie bloque l’envoi d’aides communes en matière de défense à l’Ukraine. Cette rhétorique est importante pour comprendre la position de la Hongrie dans ce contexte, avait affirmé récemment Bàlint Ablonczy (journaliste hongrois), lors d’une rencontre dédiée au sujet à la MdEP en juin 2024, car elle n’est pas forcément pro russe mais ne s’oppose pas frontalement non plus au régime. Orban s’est rendu en Ukraine pour la première fois seulement le 2 juillet 2024, le lendemain de la prise de fonction de la présidence hongroise, d’ailleurs, et a continué son voyage vers Moscou et puis Pekin, créant la surprise au sein de l’UE. Le Premier ministre hongrois a appelé à un « cessez-le-feu », selon la presse hongroise. Pour rappel, ce n’est pas Viktor Orban qui préside le Conseil de l’UE, mais ses ministres.
Enfin, suite aux élections européennes, le 30 juin a été annoncé une nouvelle alliance au sein du Parlement européen, l’alliance des « Patriotes pour l’Europe », rassemblant l’extrême droite portugaise, tchèque, autrichienne et hongroise. Renforçant de facto la position de ces partis.
C’est dans ce contexte là que la présidence hongroise était très attendue et redoutée par les autres Etats membres. Cependant, le programme reste un programme classique. Bien qu’il ait été publié seulement deux semaines avant la prise de fonction (une première dans l’histoire des présidences). Le programme s’inscrit dans un cadre technique, mettant en avant sept points majeurs :
- nouvel accord européen sur la compétitivité
- le renforcement de la politique européenne de défense
- une politique d’élargissement cohérente et fondée sur le mérite
- endiguer la migration illégale
- façonner l’avenir de la politique de cohésion
- une politique agricole européenne centrée sur les agriculteurs, relever les défis démographiques.
Ces points mettent en avant le contexte extraordinaire des guerres qui se profilent non loin de l’UE, ainsi que le retard de l’UE (industrialisation…) vis-à-vis des autres puissances mondiales. Ce programme se montre conscient des défis et des enjeux auxquels fait face l’UE.
L’année 2024 est une année de transition, elle marque le début d’un nouvel agenda stratégique 2024-2029 en coopération entre le Conseil, le Parlement et la Commission, qui viennent tous d’être établis. La présidence hongroise devra alors assurer la continuité de ces travaux pendant le second semestre 2024. Lors de la cérémonie d’ouverture le 1er juillet à Bruxelles, l’ambassadeur permanent de la Hongrie auprès de l’UE (depuis septembre 2022), Balint Ódor, a exprimé sa fierté de présider les réunions du Conseil pendant cette période politique cruciale et géopolitiquement complexe. La guerre en Ukraine est en cours, les pays des Balkans espèrent que la présidence hongroise leur fera la part belle dans le processus d’elargissement….enjeux et affaires à suivre ?